Chez Batorama, on aime vous parler des monuments et autres bâtiments remarquables que l’on croise ici et là, aux détours d’une rue strasbourgeoise. Après le lycée des Pontonniers et le Palais Rohan, on part cette fois-ci dans le quartier de la Petite France pour aller à la découverte des Ponts Couverts, une petite merveille architecturale et technique unique, qui évidemment n’est pas là par hasard.
Et nous voilà parti pour une balade toute en tranquillité en plein centre-ville pour découvrir ensemble l’histoire, les secrets et surtout la fonction de ces ponts qui n’est bien sûr pas qu’esthétique.
Ahh les Ponts Couverts, leurs tours qui se dressent au milieu de l’Ill et les canaux qui serpentent au milieu de la ville, on y revient toujours avec le même plaisir, que l’on soit strasbourgeois ou d’ailleurs. Situé dans un quartier sans voiture entièrement dédié aux piétons, c’est certainement un des lieux à ne pas manquer à Strasbourg, et pour ne rien gâter, il est le passage obligé pour les amoureux en manque de romantisme. Le cadre, c’est donc celui d’une carte postale composée de bras de rivière qui s’écoulent tranquillement, de vieilles pierres et de couples qui se baladent entre les Ponts Couverts.
Mettons de côté un instant, l’ambiance toute particulière qui y règne et parlons Histoire. Petit retour dans le passé de notre ville millénaire.
L’histoire des Ponts Couverts est militaire, mais pas seulement.
Les historiens placent la construction des Ponts Couverts entre 1230 et 1250 dans un Strasbourg qui tire parti du trafic fluvial local et international, les échanges se faisant principalement par bateau et à cheval.
À l’origine, comme leur nom l’indique, les ponts étaient couverts, mais même s'ils ont désormais perdu leur coiffe, ils ont conservé cette appellation.
Construits en briques à une époque où Strasbourg était une zone à défendre, et qui bénéficiait en plus d’un circuit fluvial exceptionnel, les ponts servaient à défendre la ville à son extrémité sud-ouest.
Ces ponts, qui servaient aussi bien sûr à connecter les rives entre elles et à faire passer Hommes et marchandises, étaient également gardés par quatre tours en brique dont trois sont encore parfaitement conservées.
Aujourd’hui, il reste la Heinrichsturm, qui a servi par la suite de prison civile, la Hans von Altheimturm et la tour des Français, qui ont servi de prison militaire aux XVIIIe et XIXe siècles. La Maltzenturm fut malheureusement victime d'un incendie puis rasée en 1869.
Mais si ces ponts en forme de galeries surmontés d’un toit en tuiles servaient à défendre la ville et à fluidifier le trafic, elles servaient aussi à protéger les habitants…des autres habitants.
Un rôle (méconnu) de mise en quarantaine pour les malades de l’époque
Si vous êtes déjà passé par le barrage Vauban (le passage Georges Frankhauser qui relie la place du Musée d’Art Moderne à la Place du Quartier Blanc), vous avez sans doute remarqué qu’à chacune des extrémités, il y a des portes parfois bien gardées.
À l’origine, les ponts étaient couverts d’un toit un peu comme ce barrage et surtout : ils étaient également fermés à leurs extrémités grâce à des pans de bois percées d’une meurtrière.
De cette manière, les gardes pouvaient protéger la ville et ses habitants de l’assaillant, freiner les indésirables et stopper les personnes atteintes de maladies.
Ces malades, qui véhiculaient à l’époque des maladies contagieuses décimant des populations, étaient stoppés là, pour ne pas contaminer les autres quartiers de la ville…cruel mais sans doute efficace.
La fin d’un rôle stratégique pour des ponts désormais connus comme attraction touristique
Même si, au fil des siècles, les pouvoirs publics ont tenté des améliorations, notamment en remplaçant le bois des piliers par du grès, puis en ajoutant des herses au XVIe siècle, la défense se fait de moins en moins efficace.
Au fil des années, les Ponts Couverts perdent donc leur utilité première, notamment grâce à la modernisation des armes des assaillants à la conquête de Strasbourg.
L’usage défensif disparaît peu à peu, et les tours que nous avons évoqués se transforment en prison. Strasbourg se rattache au Royaume de France par la suite et modernise son attirail défensif.
C’est à ce moment-là que le Barrage Vauban, construit entre 1681 et 1688, apparaît pour défendre à nouveau la ville comme il se doit.
Aujourd’hui bien heureusement, les ponts et le barrage ne servent plus à défendre la ville, mais à promener les passants et les curieux entres les différents quartiers.
Particulièrement bien conservés, ces édifices majestueux sont un véritable bond dans le passé, une fenêtre sur nos ancêtres et sur la vie d’avant. Une vie difficile et rude qui a laissé place à la flânerie et aux plaisirs dans un lieu exceptionnel où le monde entier se retrouve et s’embrasse.
Vous l’avez compris, c’est l’un de nos lieux préférés à Strasbourg, et il mérite évidemment le détour !
Auteur : Pietronave Bastien