Le Dragon, fable inspirante en équilibre entre le drame et l’humour cinglant, ressuscitée par Thomas Jolly qui la présente du lundi 31 janvier au mardi 8 février 2022 au théâtre National de Strasbourg, rappelle à nos consciences les valeurs universelles qui consolident l’humanité.
Le Dragon est un appel pertinent et moderne, au courage et à la prise de conscience. Cette pièce issue du conte écrit par Evguéni Schwartz, un auteur appartenant à cette génération d'écrivains Russes, qui avait vingt ans au moment de la Révolution d'octobre 1917. Il acquiert une réputation de conteur dont l'humour émerveille. Dans ses farces et parodies, l’écrivain se démarque par son originalité et son sens de la satire. La pièce est née dans une Russie autant ravagée par les vestiges du tsarisme que par l’avancée du nazisme et de la dictature Stalinienne. Caricature d'un gouvernement autoritaire, Le Dragon fut d’abord interdite sous Staline et ce, malgré son apparente légèreté. Elle fut donc censurée avant même sa création.
Le conte narre l’histoire d’un chevalier idéaliste et plein de courage qui décide de débarrasser un village du dragon qui y règne en tyran depuis des siècles, malgré l’hostilité d’une population résignée qui se complait dans l’obéissance absolue. Ainsi, le vaillant homme provoque le monstre en duel et le tue, pensant avoir libéré la cité par son sacrifice.
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« C’est une fable corrosive, politique et macabre… écrite en 1944 par l'auteur russe et qui décrit avec perspicacité, le contexte dans lequel évolue l’auteur » nous explique Thomas Jolly, metteur en scène à l’affiche, au théâtre national de Strasbourg, du 31 Janvier au 8 Février 2022. « Cette critique virulente de toute forme de dictature et de totalitarisme, exposée avec humour et finesse, rend la pièce universelle et adaptée à tous les contextes géographiques. A travers Le Dragon, Schwartz traite un sujet sérieux, très sérieux même ! Mais il utilise beaucoup d'humour corrosif et grinçant qui, je crois aujourd'hui, vient nous rappeler et nous mettre en vigilance sur ce qui corrompt, fend et abime la base même d’une humanité soudée et solidaire !».
C'est ce qui vous a le plus poussé à mettre en scène cette pièce ?
« J'avais une vraie question qui était : dans cette période trouble dans laquelle nous vivons, à quoi servirait le théâtre ? comment -en tant que metteur en scène travaillant dans le service publique- je pouvais utiliser le théâtre pour interroger spectatrices, spectateurs et au-delà ? » nous confie Jolly. « Ce qui m'a intéressé c'est cet éclairage très humain et optimiste qui veut montrer que finalement, dans toute cette noirceur, ce qui importe réellement c’est que lorsque les spectateurs entrent pour voir une pièce, ils repartent avec des réflexions et des questionnements. C’est cela qui fait en sorte que la pensée puisse circuler ou se remette en marche car c’est aussi à ça que sert le théâtre : nous faire rêver mais surtout, réfléchir ».
Le metteur en scène rouennais sait donner envie d’en savoir plus et d’en lire davantage sur Schwartz et sur le contexte historique de la création de ce texte fabuleux qu’est Le Dragon. Les dénonciations émises par Schwartz et que Jolly remet en scène et porte avec passion, continuent de proposer une réflexion judicieuse sur le totalitarisme et ses répercussions sur les peuples quel que soit leur emplacement géographique. Ainsi, Le Dragon fait allusion à certains dirigeants actuels, ou qui l’étaient encore il y a peu, de telle sorte que chacun de nous, en fonction de sa nationalité et de sa culture… y trouve une référence personnelle.
Plus qu'une dénonciation stérile, je vois chez vous un positionnement bienveillant, une sorte de démarche d'éveil ?
« C'est ça en effet ! Je m'inscris dans cette volonté noble de Schwartz, de produire la fable qui nous éveille et nous remet en lumière des vigilances, ou des lanternes pour ainsi dire, à certains endroits obscurs de notre humanité partagée » explique le metteur en scène dont la pièce, au-delà du message porté, est une œuvre techniquement riche en effets spéciaux, en jeux de lumières et de machineries, notamment avec cette représentation fabuleuse du dragon avec trois têtes. « Il y a eu évidemment pas mal de couacs liés à la situation sanitaire, à cause d'absences, d’isolements... Mais depuis une semaine, en étant assez vigilants les uns et les autres, on a pu jouer tous les soirs sans que personne ne tombe malade. On se fait tester régulièrement et il y a eu un réaménagement pour permettre à la pièce de tourner, mais on a réussi à tout faire. » se félicite ainsi Thomas Jolly.
On retrouve ici tout l’univers complexe du metteur en scène avec sa revendication d’un théâtre engagé au service de la réflexion et de la pensée. L’interprète de Xipharès -dans la pièce Mithridate de Racine que met en scène Éric Vigner- chérit le lien qu’il entretient avec le public et c’est bien pour ça que je ne peux que vous encourager à aller voir la fable d’Evgueni Schwartz, ressuscitée par Thomas Jolly : Le Dragon.
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Thomas Jolly, comédien et metteur en scène né à Rouen au début des années 80, dirige depuis 2020, le centre dramatique national Le Quai, situé à Angers. Il est, par ailleurs, le metteur en scène choisi pour la recréation de la comédie musicale Starmania de Michel Berger et Luc Plamondon à l’automne 2021 à la Seine Musicale.
Au TNS, il a présenté Le Radeau de la Méduse de Georg Kaiser en 2017 (avec le Groupe 42 de l’École du TNS) et Thyeste de Sénèque en 2018 – où il interprétait Atrée.
Il met ici en scène Le Dragon de l’auteur russe Evgueni Schwartz (1896-1958), pièce qui a été interdite au lendemain de sa première représentation en 1944.
Texte
- Evgueni Schwartz
Mise en scène
- Thomas Jolly
- Damien Avice
- Bruno Bayeux
- Moustafa Benaïbout
- Clémence Boissé
- Gilles Chabrier
- Pierre Delmotte
- Hiba El Aflahi
- Damien Gabriac
- Katja Krüger
- Pier Lamandé
- Damien Marquet
- Théo Salemkour
- Clémence Solignac
- Ophélie Trichard
- Fernand Texier, Mathis Lebreton, Adem Nefla
Auteure : Hanane Geyer
A propos de l'auteure
Rédactrice et réalisatrice multimédias, Hanane a travaillé au Pays basque français, en Italie et au Maroc, avant de s’installer en Alsace, captivée par la beauté et la richesse de notre région.
Avec un double cursus médiation linguistique interculturelle à Sciences Po. à Milan précédée par une prépa à l’ENSBA de Montpellier, elle maîtrise 5 langues à l’écrit comme à l’oral et pratique l’illustration digitale à main levée. Hanane intervient auprès des établissements scolaires du deuxième cycle, mettant en place des projets d’éducation à la déontologie des médias et à l’utilisation responsable des réseaux sociaux.